Une passion italienne
Bien que divers et de belle facture, les jouets italiens sont assez méconnus hors de la Péninsule. Il faut dire qu’ils ont été peu exportés. L’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne, qui dominaient le marché du jouet européen jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, pratiquaient une politique protectionniste qui ne laissait pas beaucoup de place à la concurrence. Jusqu’à l’arrivée sur ce segment de géants venus d’Asie et des États-Unis qui s’imposèrent irrésistiblement. Après l’histoire de la marque Domo, voici un tour d’horizon des principaux industriels du jouets transalpins abordés par le prisme des autos en tôle grandes échelles.
Ingap, le pionnier
Ingap (Industria Nazionale Giocattoli Automatici Padova, Industrie nationale de jouets automatiques de Padoue) reste la marque la plus célèbre. Fondée en 1919, Ingap a fabriqué un grand nombre de modèles de voitures, trains, jouets scientifiques en tôle… A son apogée, avant la Seconde Guerre, l’entreprise comptait 600 employés au service d’une production de qualité, créative et attachante.
Ventura, la passion automobile
Ventura est une entreprise de jouets fondée par Angelo Ventura en 1936 à Trévise en Vénétie. De 1936 à 1940, la maison se spécialisa dans la fabrication des avions et bateaux en bois aux couleurs vives. En 1951, Ventura s’installa à Torno sur les bords du lac de Côme en Lombardie. La marque connut son âge d’or dans les années 1950 au moment où les stylistes italiens dévoilaient au monde leur immense talent. Abreuvé à cette source, Ventura proposa plusieurs modèles réduits d’une exceptionnelle qualité, considérés comme les plus beaux jouets automobiles. Ce qui fait qu’aujourd’hui ils sont fort recherchés des collectionneurs. Ventura cessa définitivement ses activités en 1982.
L’Alfa-Romeo 6C 2500 “Villa d’Este” est en aluminium brut ou peint. Les parechocs, la calandre, les jantes et les optiques sont en laiton. Le plancher est en bois laqué. Dotée d’un mécanisme d’horlogerie, l’Alfa-Romeo a été reproduite en deux versions, cabriolet et hard top, par Ventura en 1949. Notons que dans ses ateliers de taille modeste, Ventura ne travailla que des métaux ductiles (aluminium et laiton) n’ayant pas de presses assez lourdes pour estamper la tôle de fer.
Maître dans la miniaturisation de belles voitures réalistes, Ventura proposa un panel de jouets beaucoup plus fantaisistes. En 1946, cet étonnant bolide profilé à mécanisme d’horlogerie, dit “Freccia” (flèche en français), a peut être été conçu un hommage à F. Marinetti, fondateur du “futurisme”, un mouvement artistique glorifiant la modernité et la vitesse, décédé en 1944 à Torno, ville où siégeait l’entreprise Ventura à la même époque.
Superlux, une vie trop brève
Superlux, une firme créée à Milan en 1947, a produit cette magnifique voiture en tôle laquée qui ne remporta pas le succès espéré à cause de son prix trop élevé. L’existence de cette entreprise fut d’ailleurs brève puisqu’elle ferma ses portes au début des années 1950.
Mercury, la classe internationale
Enfin, pour terminer ce tour d’horizon non exhaustif, nous avons choisi d’illustrer la production de la célèbre maison Mercury avec un élégant modèle créé en 1955. Mercury s’est lancé dans la production de voitures-jouets en 1945. Si la marque connaîtra ses heures de gloire dans les années 1960 avec ses réductions au 1/43e , on ne saurait occulter ses créations antérieures d’une grande qualité de finitions. Tel est le cas de cette Lancia Carrera D 24, moulée en aluminium sous pression. Elle est dotée d’un système de manœuvre original composé d’une longue tige en deux sections qui s’insère dans une prise spéciale mobile située à l’arrière du véhicule. Le volant dispose des commandes pour activer les phares et le klaxon électriques alimentés par une pile logée sous le châssis.
Monoplace compacte et élégante, la Lancia Carrera D 24, conçue par Pininfarina, fut pilotée par les plus glorieux champions, dont Juan-Manuel Fangio et Alberto Ascari, et remporta de prestigieuses victoires en Championnat du monde des constructeurs. Son brillant palmarès ne pouvait qu’inciter Mercury à reproduire avec brio cette superbe auto très convoitée en son temps par les pilotes en herbe ainsi que par les collectionneurs d’aujourd’hui.
Estimation : Les jouets présentés ici sont rares. A titre d’exemple, signalons un cabriolet Alfa-Romeo Ventura adjugé 2295 € chez Acturial en 2010.
Martine Hermann et Giuseppe Scarani
(Photos © Giuseppe Scarani, collectionneur de jouets anciens)