Avions jouets argentins

Ce n’est qu’en 1947 que Trono présente son “Hydravion Vigía”, propulsé par un jet de vapeur, en exploitant des matrices de son “Torpilleur PT12” de type pop-pop.

Hydravion Vigía Trono, en tôle émaillée, propulsé par réaction de jet de vapeur, L. 16 cm (1947).

Les années 1950, l’âge d’or du jouet argentin

Des années plus tard, l’industrie du jouet en Argentine connaîtra son âge d’or. Apparaîtront alors divers modèles d’avions, parmi lesquels des répliques de jouets étrangers. Dubini et Cía combina les moules de son “Bateau à vapeur Corsario” et du “Sous-marin Pirate” (une copie du Submarine de Wolverine) pour créer un “Hydravion Corsario” qui portait l’immatriculation CF 85 ARA et représentait un modèle en service dans la marine argentine.

Hydravion Corsario CF 85 ARA, en tôle d’acier émaillée, propulsé par réaction de jet de vapeur, L. 37 cm (1952).

En 1952, Vispa, la société des immigrés italiens Viola et Spadetto, lança le petit avion de voltige “Avispa GU 829”, une réplique du “Ali Bell 266” produit par Belloni en Italie. Ce même jouet était également commercialisé en Argentine sous la marque Juar.

Avispa GU 829 Vispa et Juar, avions de voltige en tôle lithographiée, mécanisme d’horlogerie, L. 10 cm (1953).

Des modèles historiques

L’année suivante et avec l’implantation définitive du matériau plastique dans l’industrie, Trovador a surpris avec son “Aerolíneas Argentinas”, une maquette du Douglas DC-6 immatriculé LV-ADV, baptisé “Presidente Perón”.

Publicité de Trovador pour son Douglas DC-6 Aerolíneas Argentinas, magazine Juguetes, 1953.

Viendront ensuite d’autres modèles basés sur des avions existants : le “Pulqui II”, conçu en Argentine par l’ingénieur allemand Kurt Tank, créateur du Focke-Wulf Fw 190 ; et le “Gloster Meteor” britannique. Le 16 juin 1955, certains Glosters, acquis par l’armée de l’air argentine auprès de la Royal Air Force en 1947, participèrent à un coup d’État manqué contre le gouvernement de Juan Domingo Perón. Dans cette tentative, ils ont bombardé la Plaza de Mayo à Buenos Aires, faisant des centaines de victimes, et ont participé au seul combat aérien au-dessus de la capitale argentine.

Publicité de Trovador (ci-contre) pour ses avions Aerolíneas Argentinas, Pulqui II et Gloster Meteor, magazine Juguetes 1955.
Gloster Meteor Trovador, plastique avec décalcomanies, L. 16 cm (1955).

Cette même année, Vispa présenta son “Avion supersonique” VI-PA, une copie du Nr.105 Flieger de Heinrich Wimmer (HWN) allemand. En 1956, ce fut au tour du “Aérospatial” VSP IAX, réplique du “Phantom” de Tipp & Co. Une version militaire de ce modèle à cocarde française, baptisée “Flèche spatiale” V-H, fut également produite sous la marque Vispa-Halcón.

Avion supersonique VI-PA Vispa, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, système de pierre à briquet produisant des étincelles, L. 21,5 cm (1955).
Avion Aérospatial VSP IAX Vispa, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, L. 27 cm (1956).
Avion Flèche spatiale V-H Vispa-Halcón, en tôle lithographiée, à friction, L. 27 cm (1957).

Cependant, la nouveauté de 1956 a été apportée par Compa Argentina et son “Constructeur aéronautique Combiplano”. Avec ce kit de pièces métalliques pré-moulées ont pouvait construire 21 modèles différents d’avions existants.

Publicité de Compa Argentina pour son Constructeur aéronautique Combiplano, magazine Patoruzú, 1957.
Pulqui II assemblé avec les pièces du Constructeur aéronautique Combiplano, en tôle d’acier émaillée, celluloïd et caoutchouc, L. 41 cm (1956).

Pour sa part, dans la dernière période productive et avec l’intention de moderniser ses modèles, Matarazzo a présenté son “Aéroplane R”, un quadrimoteur inspiré du Douglas DC-6, avec le numéro d’immatriculation NC-153 et une cocarde britannique sur le stabilisateur vertical de l’empennage arrière.

Aéroplane R NC-153 Matarazzo, en tôle lithographiée et zamak, mécanisme d’horlogerie, les hélices tournent, L. 27 cm (1956).

Sans aucun doute, l’influence de “l’ère spatiale” a enthousiasmé certains fabricants qui reproduisaient des avions au design futuriste. En 1957, la société S reproduit le “Nr.132 Flieger mit Fliegender Untertasse” de Jean Höfler (JH), sous le nom d’Avion mystérieux. Un autre jouet allemand, le “Nr. 10-2 Stratoliner” de Huki Kienberger (HK) a été copié par un fabricant argentin non identifié.

Avion mystérieux 132 S, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, l’hélice tourne, L. 24 cm (1957).
Stratoliner 10-2, fabricant non identifié, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, L. 15 cm (1956).

Un peu dépassée, en pleine période des avions à réaction, Lindamatic a présenté son “Avion de chasse” en deux versions :  l’UCAF FL-2072, une réplique avec une lithographie différente de l’original japonais “Friction P-256 Airplane” de Yonezawa ; et le “Cessna AV 6754”, une copie du “Cessna N4520” de Yoneya Toys.

Avion de chasse UCAF FL-2072 et Cessna AV 6754 Lindamatic, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à friction, système de pierre à briquet produisant des étincelles, L. 18 cm (1958).

L’avènement des avions à réaction

• Les années 1960

Finalement, les avions à réaction sont arrivés dans l’industrie argentine. Vispa-Halcón a rénové l’ancienne matrice de son Avion supersonique, a changé la lithographie et l’a transformé en avion de ligne avec l’immatriculation C17564 et des cocardes britanniques sur ses ailes. Un constructeur non identifié a produit le “Comet 4 ALAC”, une réplique de “Comet 4 BOAC” du japonais Daiya.

Avion supersonique C17564 Vispa-Halcón, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, système de pierre à briquet produisant des étincelles, L. 21,5 cm (1958).
Comet 4 ALAC, fabricant non identifié, en tôle lithographiée, mécanisme à friction, L. 27 cm (1958).

Au milieu des années 1960, le “Jet Halcón” de Vispa-Halcón, basé sur le “TWA Boeing 707” de Cragstan, est devenu un favori des enfants en raison de sa grande taille. Un peu plus modeste était la “Caravelle”, fabriquée par Mai sous la marque Jaguar, inspirée de la “Caravelle SE-210” de Jouets Mont-Blanc et présentée en différentes versions : Aerolíneas Argentinas, Air France et Lan Chile.

Jet Halcón Vispa-Halcón, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à friction, L. 42 cm (1965).
Caravelle Air France Mai-Jaguar, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à friction, L. 25 cm (1966).

Profitant du succès de la série télévisée Batman en Argentine, en 1967 Mai a transformé la “Caravelle” en “Batiavion”, à travers une ingénieuse adaptation de la figure de Batman dans le dessin lithographique. Sous le stabilisateur horizontal de la queue, on peut lire : « Fabriqué sous licence National Periodical Inc. N. York ».

Batiavion Mai-Jaguar, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à friction, L. 25 cm (1967).
Mention de la marque.

• Les années 1970

Au milieu des années 70, sous la dictature militaire, les avions de combat revenaient dans les vitrines des magasins de jouets. Vispa-Halcón a de nouveau utilisé la matrice de son avion à réaction à ailes delta “Aérospatial” et “Flèche spatiale” avec un nouveau nom : “Faucon de l’espace”. Ce jouet était décoré d’une lithographie imitant le camouflage de l’intercepteur supersonique français Mirage III, entré en service dans l’armée de l’air argentine en 1972.

Faucon de l’espace Vispa-Halcón, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à friction, L. 27 cm (1978).

D’autre part, la firme Puky a présenté en 1976 le “Pucará” A-127, une maquette en plastique à l’échelle 1/72e de l’avion d’attaque au sol à turbopropulseur, construit dans les années 1970 par l’usine d’avions militaires pour le compte de l’armée de l’air argentine pour combattre la guérilla.

Pucará A-127 Puky, maquette en plastique au 1/72e, L. 19 cm (1982).

• Les années 1980

En avril 1982, la guerre des Malouines ou conflit de l’Atlantique Sud (Falklands War pour les Anglais) a éclaté entre l’Argentine et la Grande-Bretagne. En plus d’inculquer l’esprit patriotique aux enfants, ce fut une excellente opportunité commerciale pour Vispa-Halcón qui a renouvelé le stock du “Faucon de l’espace”, compte tenu de la participation du Mirage III dans le conflit. De son côté, Puky a utilisé la même stratégie et a ajouté le texte “Le glorieux défenseur de nos Malouines” sur la boîte du “Pucará”. De même, le “set de guerre” a t-il été complété avec “l’Hélicoptère télécommandé”, dans sa version camouflage de la Force Aérienne Argentine et comme ambulance de la même arme, des répliques modifiées du “Sky Taxi Panam” du japonais Mansei Toys / Haji.

Hélicoptère télécommandé Fuerza Aérea Argentina Puky, en tôle lithographiée et plastique, mécanisme à pile, roule sur le sol et les hélices tournent, L. 32,5 cm (1982).

Ce conflit fut également l’occasion imprévisible de terminer le cycle commencé par le magazine pour enfants Billiken dans les années 1920 avec les avions en papier. La revue L.E.A Lectura Estudiantil Aeroespacial a publié le supplément spécial “Mis Aviones” avec le “I.A.58 Pucará” à découper et à assembler sur sa page central

I.A.58 Pucará à découper et à assembler, magazine L.E.A Lectura Estudiantil Aeroespacial, 1982.


Au milieu des années 1980, la concurrence des importations, principalement chinoises, a condamné l’industrie du jouet argentine, déjà malmenée, à cesser sa production d’avions.

Biblio

Juguetes argentinos de hojalata, 1900-1970, Tinplate Toys from Argentina, par Diego M. Lascano et Daniel Sudalsky, Editions Pictoria, Buenos Aires, 2022.

Avions-jouets des origines à 1945, par Frédéric Marchand, Maeght Éditeur, 1993.

Avions-jouets de 1945 à 1970, par Frédéric Marchand, Editions Langlaude.

Mes avions-jouets 1910 à 1960, collection Patrick Despature.

Diego M. Lascano
(© Texte et photos)

N.-B. : Je dédie spécialement cet article à deux “gourous” des avions jouets : Frédéric Marchand et Patrick Despature. Au début des années 90, j’ai eu l’occasion de rendre visite à Frédéric dans sa boutique magique de la rue Montfaucon à Paris, alors que j’étais un collectionneur novice dans ce domaine et je chéris toujours sa première et admirable « Bible » sur les avions jouets qu’il m’a gracieusement dédicacée.
Je ne connais pas Patrick personnellement, mais la volonté et les efforts pour constituer une si belle collection m’ont amené à lui envoyer, par l’intermédiaire de mon collègue Daniel Sudalsky, quelques avions de mes “hangars” fabriqués au Chili et en Uruguay.