Les projecteurs jouets
2e partie : le luxe du cinéma à la maison
Le Ciné Mickey
Le brevet français pour le Ciné Mickey, demandé par M. Mario Sassoli, a été délivré le 14 juin 1937 et publié le 22 septembre 1937. On ignore le fabricant de ce jouet, nommé Jouet Junior ou Junior, produit avec l’autorisation de Walt Disney. Il est présenté dans un coffret ressemblant à une boîte de jeu de construction. C’en était d’ailleurs un, les éléments dont il était constitué, carton, bois, matière plastique ou métal léger, pouvant être montés ou démontés très facilement grâce à des languettes enfilées dans des encoches. Voici son aspect une fois monté.
L’appareil, que je possède, date de 1937. Dans la boîte, sur laquelle est collée une étiquette du Printemps, se trouvent une notice d’instructions pour le montage et une fiche signalant les dysfonctionnements possibles et les moyens d’y remédier. On y relève la liste des 16 films parus et à paraître en décembre 1937, ainsi que l’annonce d’une nouvelle parution hebdomadaire à partir du 1er janvier 1938. Sous le couvercle de l’emballage, se trouve un écran de 23 x 16 cm. L’appareil fonctionne avec une pile de 4,5 volts.
Les films fournis ressemblent étrangement aux films Nic. Ils sont conditionnés dans une boîte identique à celle des films Nic, enveloppés dans une notice qui explicite l’histoire racontée dans le film, mais l’axe d’enroulement est ici en carton.
En 1938, le Ciné Mickey était vendu Au Printemps au prix de 48 fr. sans la pile. Les films coûtaient 3,75 fr pièce.
Le Ciné Egda MM
Le Ciné Egda a été fabriqué par la société éponyme, de même que le Ciné Nic français. Rappelons que la société Egda (Établissements Giacomo De Andreis) a été fondée en 1922 par un Génois, Giacomo de Andréis, installé dans le quartier de la Capelette à Marseille. Cet imprimeur sur métaux réalise des boîtes métalliques illustrées, des panneaux publicitaires et des jouets en tôle lithographiée. Le 21 janvier 1936, son fils, Mario dépose la marque Egda et signe à partir de cette date, sous ce sigle, les jouets en tôle lithographiée produits par les Ets De Andreïs (Voir la fourgonnette CR Chocolat Menier).
Un appareil moderne en bakélite
Sur les traces du précurseur espagnol Ciné Nic commercialisé dès 1931, Mario Sassoli dépose en 1935 un brevet pour un petit appareil tout d’abord produit en Allemagne par Markes & Co sous le nom de Dux Kino MM. Ce modèle inspira G. De Andreïs pour la réalisation du Ciné Egda MM. Le projecteur de cinéma Egda MM est constitué d’un élégant boîtier en bakélite, une résine synthétique moulée en une seule pièce socle et corps, qui renferme et préserve les dispositifs mécanique et optique. Un chapeau indépendant permet l’introduction du film.
Astucieux système de projection
A l’avant de l’appareil, la double optique en laiton chromé amovible assure la convergence des faisceaux de rayons lumineux. A l’arrière, le bloc en zamak abrite deux ampoules superposées de 3,8 V et 0,3 ampères et deux lentilles. Entre ampoules et lentilles, un passage en chicane fait office de guide-film.
Le logement destiné à une pile plate de 4.5 V est situé sous l’appareil ainsi que le mécanisme d’horlogerie et son remontoir protégés par un carter en métal chromé. L’alimentation électrique peut se faire aussi par un transformateur de 4 V et 0,3 ampères. Une fois le mécanisme actionné, une roue crantée entraîne le film pendant qu’ un disque muni de douze plots en cuivre fournit alternativement les deux ampoules en électricité. L’illusion du mouvement est créée par l’éclairage successif de l’image du haut puis de celle du bas de la bande du film.
La manette marche/arrêt est placée à l’arrière du projecteur. Remonté à fond, le ressort d’horlogerie est prévu pour un fonctionnement de dix minutes, soit la durée de deux films Egda MM 35 mm. L’appareil devait être placé à une distance de 80 cm minimum de la surface de projection, écran ou mur, pour un résultat visuel satisfaisant.
Des films à images alternées
Pour une longueur de 25 cm, les films Egda MM assurent cinq minutes de projection en noir et blanc. Cette durée conséquente, malgré la faible dimension du film, est obtenue grâce à l’astucieux procédé des deux séries d’images superposées sur la bande et alternativement éclairées.
Le défilement lent du film permet l’animation d’une histoire complète et cohérente. Les films ont tout d’abord été vendus roulés dans des boîtes métalliques rondes remplacées ensuite par des emballages en carton sous lesquels un numéro tamponné correspondait au titre du dessin animé. Chaque film était accompagné d’une notice résumant l’histoire et annonçant le film suivant.
Le Ciné Sélic
En 1941, Mario de Andréïs s’associe à François Lambon pour créer la Sélic (Société d’exploitation de licences industrielles et commerciales). Le petit Ciné Egda MM sera commercialisé sous son nom jusqu’en 1950. A cette date il est remplacé par un modèle approchant, le Ciné Sélic.
Sélic prend des couleurs
Son aspect, sa conception et son mécanisme sont pratiquement identiques à l’appareil Egda. Toutefois, le plastique blanc des optiques remplace le laiton chromé de l’Egda. Sélic reprend le catalogue des 46 titres de films en noir Egda. Pour la plus grande joie des jeunes spectateurs, neuf films supplémentaires sont désormais en couleurs et restent compatibles avec le Ciné Egda.
Midi-Ciné Sélic
A la Foire de Lyon de 1953, Sélic présente son nouvel appareil Midi-Ciné comme un appareil de projection à images alternées “aérodynamique et très moderne”, dérivé du Ciné Sélic. Le boîtier arrondi en métal abrite un mécanisme électrique fonctionnant à piles ou avec un transformateur. Les films 35 mm sont ceux du catalogue initial augmenté de quelques titres en couleurs.
Estimations : le Ciné Mickey se trouve aux alentours de 300 à 350 €, complet en parfait état. Le Ciné Egda, qualifié de rare, est évalué entre 50 et 100 €. Compter entre 30 et 40 € pour les Ciné Sélic.
Martine Hermann et Claude Lamboley