Un grand d’Espagne
L’histoire de la marque Paya commence durant les dernières années du 19e siècle à Ibi, une ville de la province d’Alicante en Espagne, où Rafael Paya dirige une petite entreprise de ferblanterie spécialisée dans la production d’objets usuels en tôle emboutie. En 1905, les trois fils de Rafael reprennent l’affaire familiale et fondent la Paya Hermanos (Paya frères). Rapidement, ils développent et diversifient leurs activités et orientent leur production sur le segment des jouets en métal. Fabriqués à partir de la feuille de tôle, ces jouets d’abord très simples, sont peints à la main dans des couleurs vives.
Le succès dès 1909
Pour l’Exposition régionale de Valence en 1909, Paya prépare un grand nombre de modèles de voitures, de canoës, de trains, de carrioles…, autant de créations couronnées de médailles et de succès. L’entreprise accède au premier rang des constructeurs de jouets de la Péninsule et peut soutenir la concurrence des jouets d’importation sur le marché intérieur espagnol. Ses effectifs passent de dix ouvriers en 1906 à cent en 1911. La réussite de Paya inspire Santiago Rico qui installe à son tour une entreprise de jouets métalliques à Ibi. L’émulation entre Paya et Rico favorise la richesse de la création et l’essor de la province de Valence qui dès lors concentre la majeure partie de l’industrie du jouet d’Espagne.
L’Allemagne comme modèle
En Europe, l’Allemagne est considérée comme l’incontestable chef de file du jouet en tôle. La direction de chez Paya entreprendra donc plusieurs séjours outre-Rhin pour rapporter dans ses bagages différentes réalisations des fabricants allemands Guntherman, Lehman, Kellermann, Distler, Tippco, Arnold… Arrivés en Espagne, ces jouets, sources précieuses d’inspiration, sont souvent copiés plus ou moins approximativement. Dans les ateliers d’Ibi, l’outillage s’enrichit et se perfectionne. Les machines à découper et à emboutir elles aussi arrivent d’Allemagne. En 1914, les hostilités suspendent la production des jouets en France et en Allemagne. L’Espagne, qui n’a pas à subir la pénurie de la tôle, matière première stratégique dans les autres pays, poursuit sa production dont elle exporte une partie.
La maîtrise de la tôle lithographiée
À partir de 1919, Paya substitue la lithographie à la peinture dans la décoration de ses jouets. Dans les années 1920, cette technique atteindra un niveau de qualité comparable à celui des fabricants allemands ou français. Le premier catalogue publié par la maison Paya date de 1920. Il présente un nombre important de grands jouets faisant la part belle à de superbes automobiles. Les modèles haut de gamme disposent de mécanismes d’horlogerie. En 1923, Paya lance son premier train en tôle lithographiée animé par un moteur à clé.
L’essor et l’apogée
Sous la direction de Raimundo Paya, l’entreprise connaîtra son apogée à partir de 1930. Pas moins de mille modèles de jouets sortent des chaînes chaque année. Le premier train électrique espagnol à l’écartement 0 voit le jour en 1931, il est signé Rai (pour Raimundo Paya). D’autres trains munis de mécanismes à ressort sont également fabriqués à la même échelle.
Au début des années 1930, Paya édite un jouet de prestige qui restera l’emblème mythique de la marque, une reproduction de la célèbre Bugatti d’une exceptionnelle facture.
Les années sombres
L’âge d’or du jouet en tôle espagnol perdurera jusqu’en 1936, année de la guerre civile qui entraîna une profonde fracture sociale et la reconversion forcée des entreprises d’Ibi dans la production d’armes et de munitions. Paya n’échappe pas à la réquisition et devra attendre trois ans et la fin des hostilités pour reprendre sa vocation. Mais, le contexte économique difficile que traverse alors l’Espagne puis l’Europe n’autorise pas Paya à de nouveaux investissements. Aussi, pendant les quinze années suivantes, l’entreprise reproduit les mêmes jouets que dans les années 1930.
Raimundo Paya envisage pourtant l’avenir avec optimisme et pense déjà à de nouveaux modèles. Et en effet, dès 1946, sort la locomotive Santa Fé qui restera au catalogue près de deux décennies.
Du plastique au déclin
En 1952, la reprise économique aidant, Paya se dote d’une unité de fabrication employant 82 ouvriers dans la ville d’Alicante. Progressivement la tôle sera remplacée par le plastique et Paya sera la première entreprise de jouets espagnole à s’équiper d’une machine pour l’injection de cette nouvelle matière. Dans les années 1970, Paya comme bien d’autres industriels du jouets subira les conséquences des chocs pétroliers, puis celles d’une concurrence accrue. En 1984, le personnel de Paya Hermanos SA se constituent en coopérative afin de sauver l’entreprise du dépôt de bilan. Ce sera le temps des re-fabrications des “Jouets d’antan”.
Musée
Le Musée du jouet de Catalogne, inauguré en 1982, présente un exceptionnel ensemble de jouets anciens majoritairement rassemblés par le collectionneur Josep Maria Joan Rosa. 4000 jouets parfaitement conservés sont aujourd’hui exposés dans le cadre de l’ancien Hôtel de Paris de Figueres. Une visite à ne pas manquer pour faire connaissance avec la profuse production des jouets espagnols et de Paya en particulier.
Musée du jouet de Catalogne, Carrer de Sant Pere 1, 17600 Figueres. Tél. : +34 972 504 585.
Biblio
Jocs & Joguets, catalogue trilingue (catalan, français, allemand) édité par le Musée du jouet de Catalogne.