Les cauchemars du laboureur
Bien qu’il ait été créé il y a environ 140 ans, voici un jeu ancien toujours d’actualité, surtout dans les périodes printanières de déclaration fiscale ou de prélèvement des impôts. Le Nouveau jeu du Percepteur est une variante du Jeu du Cheval blanc — appelé aussi Jeu de Cloche et Marteau —, très à la mode au 19e siècle, et qui était vendu seul dans un coffret ou qui faisait partie d’une de ces nombreuses boîtes de jeux de société qui distrayaient les familles, le soir à la veillée.
Huit personnages en quête d’histoire
Alors que ce dernier jeu comporte cinq cartons et huit dés à une face, ici le jeu comporte huit cartons sur lesquels sont figurés les personnages d’une histoire que vont écrire les joueurs : le percepteur, M. le Maire, le secrétaire de M. le Maire, l’avocat, le commis de l’avocat, le garde champêtre, et les deux laboureurs, Martin et Simon. Six dés sont numérotés sur une face de 1 à 6 et les deux autres sont marqués d’un M pour Martin et d’un S pour Simon. Les joueurs ont besoin de pions pour engager les mises, au moins 46 pions.
“Au Grand balcon”, jeux de voyage ou de salon
Ce jeu a été créé vers 1880 par l’éditeur A. Lion auquel succéda son fils. De 1851 à 1885, date de sa reprise par Watilliaux, cette fabrique de jeux de société en tabletterie et cartonnages, sise 210 rue Saint-Martin à Paris, a produit une grande variété de modèles dont des lotos historiques et géographiques, des jeux de cubes, des jeux de patience, des coffrets de jeux réunis comme distraction de salons ou de voyages, des damiers, des jeux d’échecs, etc. Leur boutique s’appelait “Au Grand balcon”.
Le couvercle et les cartons de cette boîte sont illustrés de façon assez caricaturale, un peu à la manière de Daumier, par Bernard Coudert dessinateur, graveur et lithographe du 19e siècle, auteur d’ombres chinoises animées éditées par Saussine, d’un petit livre, “La Joie des enfants”, édité par Legrand et de “L’Alphabet d’animaux grotesques” édité en 1860. Les imprimeurs sont Grandjean & Gascard pour le couvercle, Ellerman, Harms & Co à Amsterdam pour les cartons.
“Le Percepteur”, jeu sous-titré “Les cauchemars du laboureur” s’inscrit bien dans la tradition française, qui déplore périodiquement — et déjà à l’époque — la pression insupportable exercée par l’administration fiscale sur la majorité des travailleurs représentés jadis par les agriculteurs. Ce pourrait être de nos jours les Gilets jaunes !
“A la Galerie Vivienne”, l’honorable maison de jeux et jouets
Jules Rémond, entrepreneur et propriétaire de plusieurs magasins de jouets à Paris au cours de la seconde moitié du 19e siècle, était né le 26 octobre 1829. Selon l’édition 1861 de l’Annuaire du commerce, il a été partenaire dans le magasin parisien “Au Paradis des Enfants”. En 1864, il fut également associé à la société Perreau & Fils, mais revend cette participation en 1867 pour se consacrer à une autre boutique, “A la Galerie Vivienne”, qui avait ouvert en 1830, sous la direction de Pierre-François Guillard, marchand détaillant de corsets.
Ce magasin se présente comme “une grande fabrique de jouets, de jeux de salon et de jardin, de voitures d’enfants, de vélocipèdes, de Physique amusante, spécialiste des Bébés incassables et d’accessoires pour la danse ou le cotillon”. En 1867, Jules Rémond, est primé à Paris avec la mention “honorable”. Le jury le compare pour son excellence à l’entreprise Simonne (voir l’article “Au Nain bleu”). Il reçoit aussi un diplôme de mérite à Vienne en 1873 et une médaille lors de l’Exposition universelle de Paris de 1878. En novembre 1882, Rémond rachète l’entreprise à Simonne mais ferme ses portes en 1896.
Estimation : Ce jeu a été réédité par Watilliaux, Simonin-Cuny et Mauclair & Dacier (avec de nouvelles illustrations). Pour la version originale présentée ici compter entre 300 à 450 €.
Collectionneur de jouets anciens