1 – Dans les cours et les préaux
Avec l’été et les beaux jours, arrive le temps des jeux de plein air. Ceux-ci ont toujours existé. Souvenons-nous de Nausicaa, telle que nous la décrit Homère et telle que la découvre Ulysse naufragé sur le rivage de la Phéacie, jouant à la balle avec ses compagnes. Le XIXe siècle a vu se développer des jeux de plein air, en raison de l’enrichissement et de l’embourgeoisement de la société qui éprouvait le besoin, l’été, d’aller en villégiature, que ce soit à la campagne, dans une gentilhommière, vestige d’un passé rural, ou que ce soit à la mer, de préférence sur la côte normande, que le chemin de fer avait rapprochée de Paris et où fleurirent ces belles villas dont témoignent les maisons de poupée dites “Deauville” (Lire Une villa Belle Époque).
Les fabricants de jeux et jouets de l’époque qui accompagnèrent cette mode ont multiplié leurs créations pour élargir le champs des distractions souvent inspirées de Grande-Bretagne. Celles-ci sont tellement nombreuses que nous n’aborderons, dans ces notices, que certaine d’entre elles, sans prétendre être exhaustif : les jeux de cour et de préau, les jeux de plage, les jeux de parcs, de jardin et de campagne.
L’école publique, laïque, gratuite et obligatoire
Avec Jules Ferry, à la fin du XIXe siècle, tous les enfants de France étaient scolarisés qu’ils soient filles ou garçons, qu’ils soient de la ville ou de la campagne. On construisit des écoles primaires. Il s’agissait soit de bâtiments uniquement destinés à l’enseignement soit, dans les petits villages, de bâtiments mitoyens de la mairie. Tous avaient un espace libre pour que les enfants s’ébattent à la récréation, soit une cour, soit un préau qui protégeait des intempéries.
Corde, cerceau, bouchon, barres, marches…
On y joua beaucoup, des jeux calmes chez les filles comme on le voit sur cette carte postale, souvenir familial, des jeux plus animés chez les garçons. Le souvenir de certains de ces jeux a disparu comme les barres, le bouchon ou le jeu des marches.
Les billes
C’est un jeu dont l’ancienneté remonte à l’Antiquité. On jouait aux billes en Égypte, en Grèce ou à Rome. Ces billes, qu’on appelait dans le passé gobilles, étaient des petites sphères en terre, en pierre, en verre, en argile, en marbre. Elles étaient colorées. En général, les enfants utilisaient les plus communes, celles en terre, gardant les plus précieuses comme enjeu de partie, surtout les plus grosses qu’on appelait callot servant de cible. Ils les gardaient dans des petits sacs de toile comme celui qui nous est parvenu.
Pour jouer aux billes la technique est simple mais nécessite une certaine adresse, il faut les caler entre la première phalange du pouce et l’extrémité de l’index. Quand le pouce se détend comme un ressort la bille est projetée au loin.
Ce jeu se pratique au moins à deux joueurs et les variantes sont très nombreuses : la bloquette, le pot, la poursuite, la pyramide, etc. Le principe est d’atteindre, ou d’approcher le plus possible, un trou, une pyramide de billes, un callot. Le gagnant remporte des billes de son adversaire qu’il peut alors échanger contre des billes plus précieuses.
Les osselets
Voici encore un jeu existant depuis l’Antiquité comme le révèle cette photo montrant deux jeunes filles du IVe siècle avant J.-C.
Ces osselets sont soit des petits os de la patte antérieure d’un mouton appelés astragales, soit ils sont fabriqués en pierre, en métal ou maintenant en plastique.
On joue avec 7 à 8 osselets, de préférence avec 5. La règle du jeu consiste à prendre les osselets dans la main droite, d’essayer de les lancer en l’air et d’en retenir le plus possible sur le dos de la main qu’on retourne rapidement. Selon la face sur laquelle tombe l’osselet (concave, convexe, sinueux ou plan), on gagne de 1 à 6 points. Il existe de nombreuses variantes, tels le puits ou les rafles qui exigent beaucoup de dextérité. C’est un jeu d’adresse et de hasard qui développe l’agilité.
Les toupies
Toupie est un terme générique qui désigne des jouets qui se terminent par une pointe sur laquelle ils tournent, quand on leur imprime un vif mouvement de rotation au moyen d’une corde.
La toupie française ou toupie à ficelle est en bois, en forme de poire, avec une pointe et une queue en métal. La technique est la suivante : la ficelle ayant fait le tour de la queue, on l’amène à la base de la pointe et on la tourne en remontant autour du bois, bien régulièrement et en appliquant chaque tour de ficelle sur le tour précédent. On prend solidement la ficelle, le mieux dans une boucle, on saisit la toupie la pointe en l’air et on la lance vigoureusement pour qu’elle tombe sur sa pointe et tourne rapidement. La toupie espagnole s’en distingue en n’ayant pas de pointe.
Il existe de nombreuses variantes de toupie, en particulier le sabot. Après l’avoir lancé, on le frappe à l’aide d’une sorte de fouet en essayant de le faire avancer vers un but déterminé. C’est un jeu qui existait déjà dans l’Antiquité.
La corde à sauter
Ce jeu est généralement pratiqué par un ou plusieurs enfants dans les cours de récréation sautant au-dessus d’une corde en rotation, de manière que la corde passe sous leurs pieds et au-dessus de leur tête. Ce jeu peut se jouer seul ou à plusieurs, auquel cas deux enfants font tourner la corde pendant qu’un troisième saute. Il existe aussi une variante plus difficile pratiquée avec deux cordes. Souvent, les enfants chantent en cadence avec les sauts.
Quand il s’agit d’une longue corde tenue par deux enfants, qui la font tourner régulièrement en la tenant suffisamment lâche pour qu’elle passe sous les pieds des petits camarades qui sautent, plusieurs joueurs peuvent entrer ensemble à tour de rôle et, après un nombre déterminé de tours, en sortir pour laisse la place au suivant.
Les jeux sans accessoires
Tous ces jeux nécessitent des accessoires, mais il en est où ceux-ci ne sont pas nécessaires. Ils étaient aussi très pratiqués au début du siècle. Nous ne ferons que les évoquer sans prétendre épuiser le sujet tant ils sont nombreux.
• Jeu de cache-cache
Il se joue à plusieurs. Un enfant, appelé autre fois cligne musette, doit retrouver ses petits camarades qui se sont cachés tandis qu’il patientait les yeux fermés.
• Jeu de colin-maillard
L’un des enfants, les yeux bandés, doit saisir un de ses petits camarades qui tournent autour de lui en le provoquant de la voix et le reconnaitre en le palpant. Auquel cas, ce dernier, une fois reconnu, le remplace.
• Jeu de marelle à cloche-pied
Les joueurs tracent sur le sol une marelle, sorte de rectangle terminé aux deux extrémités par un demi-cercle. Le rectangle est divisé. Le premier joueur désigné par le sort lance un palet, en sautant sur un pied, de case en case, tout en évitant la case où se trouve le palet, ainsi que d’empiéter sur les lignes du tracé. Il est suivi des autres joueurs. Le gagnant est celui qui le premier termine la totalité des parcours à réaliser.
D’autres jeux sont également pratiqués dans les cours de récréation : les quatre coins, le saute-mouton, la ronde avec ses comptines, etc.
Biblio
Dictionnaire des jeux, sous la direction de René Alleau et Renaud Matignon, Henri Verrier éditeur, 1964.
Claude Lamboley
Collectionneur de jouets anciens