4 – En mouvement et en extérieur
Les enfants sont pleins d’énergie et ont besoin de se dépenser. Courir, sauter, nager sont des exercices ludiques et physiques qui n’ont pas besoin d’accessoires. Cependant, certaines distractions de jardin nécessitent un matériel spécifique, c’est le cas des jeux de balles ou des jeux de déplacement comme le vélo. Voici donc quelques jeux parmi d’autres qui permettaient, avec l’aide d’accessoires, de canaliser l’énergie débordante des enfants.
Le cerceau
Le cerceau primitif est le trochus, connu dans l’Antiquité, fait d’un cercle en airain que l’on faisait tourner à l’aide d’une baguette recourbée. De manière rudimentaire, le cerceau peut être dans les campagnes un simple cercle de tonneau qu’on fait tourner devant soi avec un bout de bois. Sinon le jouet, tel qu’il était vendu dans les magasins et les bazars, était un cercle en bois de 50 cm de diamètre, comme celui présenté ici, qu’on propulsait en courant par petits coups répétés avec un bâtonnet.
À partir de 1900, on en fabriqua qui étaient semblables à une roue de bicyclette agrémentée d’un grelot que l’on poussait à l’aide d’un manche fixé au moyeu, ce qui permettait à un petit enfant de le pousser et de le diriger, comme on le voit dans cette photo datant du début du siècle.
Le tricycle
Le tricycle est un jouet qui a été précédé par le cheval mécanique. Celui-ci, à partir de 1845, sera un jouet qui fera rêver beaucoup d’enfants.
On en a décrit un exemplaire de notre collection dans la notice Les chevaux.
J’en rapprocherai un jeu, qui évoque le cheval, le jeu de guide, que j’ai décrit aussi dans la même notice. Je rappellerai que dans ce jeu, qui se pratiquait dans les parcs, on attelait un petit garçon qui jouait le rôle du cheval, tandis qu’un autre, tenant les rênes, jouait le rôle du cocher, brandissant un petit fouet, le tout dans des éclats de rire. Nous possédons un tel jouet fait de deux brassards, d’un harnais agrémenté de grelots, d’une rêne longue et d’un petit fouet.
Alors que le tricycle est un jouet pour petits enfants, la bicyclette largement utilisée par les enfants plus grands a, quant à elle, été précédée par la draisienne, qui est un véhicule à deux roues alignées que l’on fait avancer en poussant sur le sol avec ses pieds, et par le vélocipède , appelé grand-bi, qui possède une roue avant d’un très grand diamètre et une roue arrière beaucoup plus petite, l’intérêt de la grande roue avant étant d’augmenter la distance parcourue pour un tour de pédale. Ce sont ces deux jouets qui sont représentés dans cette vignette publicitaire traitant des jouets anciens.
La bicyclette est donc l’avatar ultime de ces jouets de plein air. Jouet qui reste toujours actuel, comme on le voit dans cette photo personnelle datant de 1942.
L’auto-skiff
Ce jouet auto propulsé est l’ancêtre du cyclorameur. Il était fabriqué dans les années 20 par la Manufacture française d’ameublement de jeux, jouets et voitures d’enfants dont les factures étaient ornées d’un dessin de Poulbot représentant une course d’auto-skiffs, qu’on retrouve dans une publicité extraite de L’Illustration de 1925, affirmant que « cette voiturette sportive et perfectionnée assurera aux enfants la santé et la joie » !
Notre auto-skiff est en bois et mesure 86 cm de longueur, 23 cm de large dans sa plus grande largeur et 20 cm de haut. C’est un petit véhicule à propulsion avec les bras et les jambes et système à ressort de rappel. Les bras tirent sur une corde qui s’enroule autour d’une poulie centrée sur l’axe des roues arrières et qui coulisse dans une petite poulie à l’avant, les jambes font virer les roues avant, permettant de diriger le véhicule.
Le siège est coulissant. Ce véhicule est muni de quatre roues, certains modèles n’en ayant que trois. Ces roues sont en métal, peintes en rouge, avec un pneu rond en caoutchouc et mesurent 15 cm de diamètre. Il y a un vestige d’étiquette à l’avant. C’est un objet qu’on voit rarement proposé à l’achat.
La trottinette
Simple jouet à l’origine, la trottinette apparaît au tout début du XXe siècle. Les premiers modèles sont composés d’une planche portée par trois roues en bois. Leur rusticité permet de les construire facilement. Par la suite, on réalisa des trottinettes entièrement métalliques, les roues seront munies de pneumatiques et un guidon sera ajouté pour diriger la roue avant. En réalisant un modèle à deux roues, on se rapproche de la trottinette actuelle. L’enfant se déplace, un pied sur la trottinette, l’autre, au sol, le poussant. Dans les années 1950, apparaissent des modèles munis d’une pédale qui entraîne une chaîne reliée à la roue arrière. En pompant rapidement avec le pied, on roule plus vite et plus longtemps sans avoir besoin de mettre pied à terre. Il s’agit toujours d’un jouet pour enfants auquel on donne parfois le nom de “patinette”. Depuis quelques années, ces trottinettes se sont électrifiées et sont devenues des moyens de « mobilité douce » pour enfants et adultes.
Les patins à roulettes
L’origine des patins à roulettes est mal connue, peut-être 1670, ce dont témoignerait un croquis de Jean Bérain représentant Arlequin avec des souliers à roulettes. On attribue avec certitude leur invention à John Joseph Merlin (1735-1803) originaire de Huy, ville de la Belgique actuelle. Il eut l’idée, vers 1760, d’adapter le patinage sur glace à la terre ferme en fixant des rouleaux en métal en ligne sous une plaque de bois. En 1852, l’anglais Joseph Gidman déposa un brevet pour des patins à roulettes équipés de roulements à billes. Les roues sont en ligne comme on le voit sur cette publicité de 1860.
Les patins présentés ici datent des années 1920. Ils sont à quatre roues à roulement à billes, disposées 2 par 2. Ils sont en métal nickelé, de taille réglable avec des lanières de fixation en cuir.
Les autos à pédales
N’oublions pas les autos à pédales qui ont fait la joie des enfants de parents fortunés. Elles ont été proposées à la vente dans les grands magasins dès les premières années du XXe siècle, ce dont témoigne cette carte postale datée de 1911.
Une marque de jouets, Eureka, créée par M. Kratz, active de 1883 à 1983, commercialisera entre les deux guerres ces belles autos. On peut en rapprocher les avions à pédales plus rares.
Les aéroplanes
Ceci nous amène à évoquer les jouets volants avec lesquels les enfants jouaient en plein air. Les avions et autres aéronefs sont faits pour le plein air. L’enfant, debout tient l’avion à bout de bras comme le montre cette photo personnelle et le lance avec force après avoir remonté l’élastique torsadé qui sert de moteur ou tendu une sorte de fronde en élastique.
Nous en avons décrits plusieurs dans notre notice Les jouets volants. Nous n’y reviendrons pas. Rappelons que certains sont fort anciens comme L’Aérien vendu avant 1910, anticipant la construction des premiers avions. Ce n’est pas la première fois que des jouets anticipent la réalité (Voir : Le phénakistiscope, l’électricité dans les Jouets dangereux d’avant-guerre…).
Voici encore le Statoplan fabriqué par la maison Steiff, entre 1931 et 1941. Il est en tissu avec armature de métal. Pour le lancer, l’enfant le projette en l’air à l’aide d’une petite catapulte en élastique. Ou encore l’Avion de France : le Condor, un aéroplane jouet fabriqué dès les années 30 par l’entreprise Les Jouets aériens français ; il est en balsa et toile de coton, l’hélice étant actionnée par un élastique torsadé. C’est lui que je tiens à bout de bras dans la photo datant de 1947, vue plus haut.
Enfin voici le Flèch’avion qui est un avion jouet de type catapulte projeté à l’aide d’une fronde en caoutchouc.
Les jeux de glisse : la luge
Concluons ce chapitre sur les jeux de mouvement en n’oubliant pas la luge avec laquelle les enfants glissaient quand les parcs et jardins étaient recouverts de neige. C’est une distraction toujours très prisée. Nous ne possédons pas de luge ancienne d’enfant mais nous avons décrit, dans notre notice Promener sa poupée, une luge de poupée, plutôt rare sous nos climats, originaire probablement d’Europe du nord. Elle est semblable à celle qu’utilisaient les enfants dans le passé, comme le montre cette vignette publicitaire évoquant une promenade en traineau au XVIIIe siècle.
Mais aussi au tournant du XIXe siècle qui a connu des épisodes de grands froids. Ne faisait-on pas du patin à glace sur les lacs du bois de Boulogne ?
Tous ces jeux, qui ont contribué pendant une centaine d’années à développer l’adresse, la force, le sens de la compétition, parfois virile mais toujours pacifique avec l’autre, disparaissent, petit à petit, à partir des années 1960.
Passés de mode pour la plupart, il ne reste que quelques jeux, certains devenus des sports : le football et le rugby, le tennis, le vélo. Les jeux sont devenus solitaires avec de nos jours les tablettes numériques ou les téléphones portables. Cela ne facilite pas la sociabilité et contribue à engendrer très certainement l’agressivité ambiante. Mais tout n’est que mode. Peut-on alors espérer le retour en grâce de ces jeux du passé ?
Claude Lamboley
Collectionneur de jouets anciens